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“La conscience de la révolution”

A la mémoire de Ahmad Yamani


9. January 2011

En ce début d’année le Front Populaire pour la Libération de la Palestine (FPLP) et la gauche pan-arabiste ont dit adieu à l’une de leurs figures historiques, Ahmad Yamani (Abu Maher).


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Avec George Habache, Wadi Haddad et Ahmad Khatib, Yamani compte parmi les fondateurs du mouvement pan-arabiste « Al-Qaumiyun » et de son successeur, le FPLP. A l’intérieur du FPLP, Yamani était considéré comme une figure unificatrice. Sa bonne réputation dans le mouvement palestinien est due à sa fermeté politique, son honnêteté dans les questions financières, son mode de vie simple, son humilité et sa proximité de la base.

Né en l’an 1924 à Sehmata, près de Akka, dans le nord de la Palestine, Yamani fit partie de cette génération de révolutionnaires palestiniens qui ont pris part à toutes les étapes importantes de la lutte : étant enfant, en l’an 1929, il fut témoin de la première grande insurrection, et participa avec son père à l’enterrement des trois Palestiniens exécutés dans la prison de Akka par les autorités d’occupation britanniques. Son père vendit la seule vache de la famille pour acheter un fusil et adhérer au premier mouvement de guérilla guidé par Ezzedine Qassam.

Yamani fréquenta l’école secondaire à Akka et Safad, puis la Faculté Arabe pour enseignants à Jérusalem. Jusqu’à la Nakba, l’expulsion des Palestiniens de 1948, il travailla pour l’autorité agraire à Akka et pour l’autorité pour l’infrastructure publique à Haïfa. Il fit sa première expérience politique dans le mouvement syndical arabe de la Palestine sous mandat britannique, dans lequel il fut une figure très active. Il devint secrétaire du syndicat des cadres et des ouvriers de l’infrastructure publique. Cette phase fut caractérisée par la lutte contre le contrôle sioniste sur l’appareil du mandat britannique en Palestine.

Au niveau politique, il coopéra à la fondation de comités populaires en Galilée pour la résistance contre l’occupation britannique et sioniste. En 1948 il participa à l’organisation de la défense des villages dans le nord de la Palestine contre les agressions sionistes, et recruta des volontaires pour « l’Armée du Salut » arabe. Il refusa de fuir avec sa famille et combattit jusqu’à ce qu’il fut pris prisonnier. Après plusieurs mois de travaux forcés il fut déporté au Liban. Là il travailla comme maître d’école dans les camps de réfugiés palestiniens. Déjà en 1949 il prit part à la fondation de l’«Organisation Militaire pour la Libération de la Palestine». Il s’agissait de premiers groupes de guérilla qui traversaient régulièrement les frontières pour «engager de brefs combats avec les occupants sionistes». Ces tentatives furent vite empêchées par l’Etat libanais.

En 1951 il rencontra George Habache et, ensemble avec d’autres, ils fondèrent le mouvement pan-arabiste «Al-Qaumiyun». A l’intérieur du Qaumiyun fut fondée la section palestinienne (Jeunesse Arabo-Palestinienne). Celle-ci fut le précurseur du Front Populaire pour la Libération de la Palestine (FPLP), qui naquit en l’an 1967.

En plus de l’activité clandestine de la Qaumiyun, Yamani fonda et s’occupa de la «Ligue des étudiants palestiniens au Liban» et porta une importante contribution à la refondation du syndicat palestinien. Bientôt Yamani reconnut l’importance de l’éducation pour la création d’un mouvement politique.

Son engagement pour la reconstruction de la société civile palestinienne (unions ouvrières et étudiantes, organisations de scouts, clubs culturels, comités populaires dans les camps de réfugiés) après sa destruction en 1948 peut être considéré comme un travail préliminaire indispensable à la création des conditions préalables nécessaires à la fondation du mouvement de résistance palestinien. Plusieurs fois il fut arrêté par la police libanaise.

En 1959 il rencontra, comme membre d’une délégation de la Qaumiyun, le président égyptien Nasser, qui communiqua sa disponibilité à armer une aile militaire de la Qaumiyun. Ensemble avec Wadi Haddad, Yamani créa les premières formations militaires qui plus tard convergèrent dans le FPLP.

A la fondation du FPLP Yamani assuma une fonction de direction dans l’organisation et fut membre du bureau politique pendant plusieures années. Dans les années Soixante il fut un personnage fondamental dans la tentative de créer un front d’opposition contre la ligne capitulationniste d’Arafat. Il fut plusieurs fois élu membre du comité central de l’OLP par le Congrès National palestinien. Il soutenait la nécessité d’une réforme de l’OLP et finalement démissionna en signe de protestation contre la politique et le style de la direction d’Arafat.

En 1991 Yamani démissionna aussi de toutes les fonctions de direction du FPLP, pour «laisser la place à la jeune génération».

Avec la mort de Yamani les Palestiniens disent adieu à l’un des derniers représentants d’une génération de combattants. Il était encore une autorité morale à l’intérieur du FPLP et du mouvement, et un point de repère politique. Son honnêteté et sa discipline, avec son intransigeance envers les principes, font de lui la «conscience de la révolution». C’est ainsi par ce titre que nous pensons à lui.

Mohammed Aburous
7 Janvier 2011

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